Lions Menilmontant c/ Racing Club De France 3 à 3
Avant-match :
L’émotion était au rendez-vous porte de Montreuil ce lundi pour le dernier match officiel de Marcel et Jo sous les couleurs des lions de Ménilmontant. Les deux milieux de terrain léonins comptaient bien profiter de leur jubilé pour ramener 4 points de plus dans l’escarcelle des bleus marines et se plurent à penser que l’un pût offrir une passe décisive à l’autre, lequel lui rendrait la pareille. Ces confidences d’avant-match ne masquaient pas l’inquiétude d’une équipe, consciente du fait que la rencontre constituait un match piège contre équipe certes mal classée, mais capable de contres redoutables. Cette inquiétude, palpable dans les vestiaires, était d’autant plus grande qu’il fallait entamer le match à 10 avec un Daniel diminué par un blocage du bas du dos. Il fallut donc composer avec un effectif réduit de telle sorte que Manu constituât le dernier rempart d’une défense organisée autour de Charles et Romain en défense centrale, d’un demi Daniel sur le côté droit et d’Yvan à gauche. Bruno, en milieu défensif s’appuierait sur Marcel à droite et Jo à gauche pour lancer les contres léonins tandis que Nico et Thomas devaient alterner appels croisés en profondeur sur les contres et remises en pivots dans les phases offensives. Il était entendu que les deux équipes notoirement fair-play s’auto arbitreraient.
1e Mi-temps :
Le ciel est bleu et les oiseaux chantent lorsque Romain déclare le coup d’envoi mais les lions ne sont pas venus pour faire une promenade de santé et après trois minutes de jeu, Bruno intercepte une passe trop molle du milieu du Racing et glisse le ballon côté droit dans la course de Marcel qui profite de l’espace entre les lignes adverses pour porter le danger dans la zone adverse ; libre de marquage, il lève intelligemment la tête et centre en profondeur à l’attention de Jo au deuxième poteau mais l’arrière gauche des bleus et blanc est assez vigilant pour dévier la balle du bout du pied gauche, dégageant du même coup le ballon en corner. Quoi que les débats soient équilibrés, les milieux de terrain des lions se sentent plus fort que leurs adversaires et pêchent par excès de confiance dans leur repli défensif pour s’employer davantage à attaquer. Bruno, puis Charles rappellent les milieux à leurs obligations mais sur une récupération de la défense marine, tous les milieux se ruent vers l’avant et le très fin ailier gauche du Racing intercepte le ballon et le transmet très vite à ras de terre en direction de l’excellent numéro 13, qui seul à 10 mètres des buts décoche sans contrôle une frappe croisée imparable et ouvre le score pour le Racing.
Un peu hagards, les lions subissent le jeu dans les minutes suivantes. Le Racing insiste côté gauche pour faire courir un Daniel, à 25% de ses possibilités et souffrant de plus en plus. Sur un des quelques centres venus de la gauche, le numéro 13 manque de peu le doublé mais sa frappe forte à bout portant est bien boxée par Manu qui sans gants, rappelle aux lions de quel sang ils sont faits : un premier tournant dans le match. C’est à ce moment que là que Daniel, incapable de courir et à peine en état de marcher décide d’abandonner ses dernières forces à l’équipe de son cœur en évoluant en qualité de gardien de but. Benoît, qui vient d’arriver, prend la place de Daniel et Manu vient soutenir les deux attaquants en prenant la place de numéro 10. Les lions sont 11 mais savent leur goal très amoindri.
Cette nouvelle organisation, si elle ne règle pas les manquements défensifs de l’entre jeu a le mérite dynamiser les offensives des lions, très nombreuses en deuxième partie de mi-temps. L’arrivée de nombreuses supportrices mettra du baume au cœur des lions et participera à les relancer dans le match. C’est d’abord Romain qui transmettra un bon ballon à Marcel, celui-ci place une accélération maîtrisée côté droit et centre en profondeur à ras de terre pour Jo, lancé du côté gauche, dans un mouvement étonnamment semblable à la première action du match. Cette fois, le ballon parvient jusqu’au milieu gauche, qui d’un subtil crochet dans la surface élimine le dernier défenseur et s’ouvre le but adverse ; un tir croisé du droit vient conclure un contre rondement mené et replace les lions dans la partie. La rencontre s’emballe alors dans une succession d’attaques de part et d’autre du terrain. Sur deux attaques placées consécutives, les lions manquent de peu de prendre l’avantage. C’est d’abord Nico qui d’une passe lobée sert Manu en pleine course mais la reprise de volée de l’attaquant frôle le poteau droit. Le côté gauche n’est pas en reste avec un ballon relayé par Charles vers Yvan qui déborde, élimine un adversaire, lance Jo du bout du pied par dessus la défense, celui-ci centre tendu du pied gauche mais Marcel, encadré par deux molosses et le gardien de but, ne fait qu’effleurer le ballon de la tête. Sur des contres bien menés, le Racing sait se montrer dangereux et se procure même de belles occasions dont un face à face de l’ailier gauche avec Daniel qui détournera du pied gauche un tir vicieux en corner dans un réflexe qui laissera l’attaquant pantois. Les acteurs et les spectateurs sentent bien que la partie peut basculer d’un moment à l’autre quand Daniel relance à la main vers Benoît qui passe à Manu au milieu, celui temporise et transmet à Bruno sans contrôle pour Marcel en position offensive qui pour la troisième fois du match sert son copain Jo en profondeur, qui crochète une première fois du pied gauche dans la surface pour éliminer un premier défenseur, feint de frapper, dribble le libéro un peu naïf et pour la deuxième fois s’ouvre le but et aligne le gardien d’un tir croisé imparable. L’action collective est somptueuse. Jo et Marcel jubilent.
Le match s’embrase un peu plus dans un style anglo-saxon, les lions manquent parfois de rigueur mais mettent du cœur à l’ouvrage. Manu hérite d’abord d’un ballon difficile à négocier à l’entrée de la surface. Le petit attaquant, plein de sang froid, se retourne et place un tir qui aurait trouvé le petit filet si le gardien, du bout des gants n’avait pas dévié la balle en corner. Manu tire bien le corner, la défense du Racing par son libéro dégage en catastrophe côté gauche mais Benoît est là pour maintenir la pression, il se saisit du ballon et centre dans le paquet pour le libéro adverse qui dégage de la tête dans l’axe vers un Bruno qui contrôle puis frappe tendu de 22 mètres, le gardien est battu mais le ballon passe à cinquante centimètres du poteau droit. Les attaques des lions sont tranchantes, les contres du Racing sont assassins. Sur une passe trop molle de Jo en retrait dans le camp des lions, c’est d’abord le numéro 13 du Racing qui se saisit de la balle et déborde côté droit pour centrer très adroitement mais Benoît en mauvaise posture et sous la pression de l’ailier adverse trouve des ressources au fin fond de ses tripes pour devancer l’attaquant bleu et blanc et dégager de la tête juste au dessus de ses propres buts. Quelques minutes plus tard, l’intenable numéro 13 déborde encore, Jo lui subtilise le ballon mais hésite à remettre en retrait pour Charles. Le meilleur joueur du Racing profite de la confusion pour lui reprendre la balle, il déborde et c’est cette fois Romain qui défend bien, puis tergiverse, le 13 récupère le ballon et centre trop près du but. Un Daniel en forme s’en serait saisi mais la douleur était trop aigüe pour plonger et l’opportuniste ailier gauche, à bout portant plaçait une tête au ras du sol et propulsait le ballon dans les filets. 2-2.
A la pause, les lions étaient contrariés et les défenseurs rappelaient aux milieux leurs devoirs de défense, à juste titre.
Manu et Marcel allaient tourner poste pour poste dans le but d’apporter plus de travail défensif au centre et de percussion côté droit.
2e Mi-temps
La recette allait payer en début de période puisque les lions monopolisaient le ballon au milieu et faisaient montre d’une fluidité impressionnante dans les relais. On vit de belles phases à une touche de balle et quelques une-deux dans l’entre jeu. Sur l’une de ces phases de jeu, Yvan lançait adroitement Thomas sur le côté gauche qui à l’angle de la surface de réparation aurait pu centrer dans le paquet mais celui-ci, incrédule, attira un défenseur en feignant de centrer et par ce geste apparemment simple libéra Jo du marquage de son défenseur pour lui proposer de l’extérieur du pied droit un ballon à ras de terre qui le plaçait en position de frappe aux 22 mètres. Il est de rares instants dans la vie d’un homme où il lui suffit pour toucher la grâce d’être comme l’enfant qu’il était au village et qui touchait du doigt les monts et les nuages ; porté par une assurance céleste et certain de son fait, Jo bottait le cuir de l’intérieur du pied droit pour le loger dans la lucarne gauche du but adverse hors de portée d’un gardien ébahi. Un frisson parcouru le stade.
A cet instant, les lions reprennent l’avantage au score et le jeu à leur compte. Si le ciel s’assombrit et si la pluie fait son apparition, le jeu des lions reste lui clair et limpide. Les accélérations de Benoît et Manu sont encore assez franches pour porter le danger dans le camp du Racing, bien regroupé. Nico bénéficie de quelques bons débordements mais la défense du Racing, très dense, lui confisque tous les ballons exploitables. Sur un des centres de Manu, c’est Thomas qui déboule au premier poteau et réussit une Madjer bien contrée par le stoppeur adverse. En retour, les contres ultra rapides du Racing font peur et Romain doit faire valoir sa vitesse de course pour rattraper le rapide avant centre du Racing, parti seul au but sur un long ballon venu de la défense. L’attaquant allait aligner le gardien mais son pied ne trouva rien d’autre que de l’herbe, car la pointe du pied de Romain surgie de nulle part, devança la frappe d’un centième de seconde. Le défenseur signe là une intervention de haut standing dans un style que n’aurait pas renié un certain arrière latéral du Milan AC. Qui a joué au football dans sa vie devine que l’attaquant du Racing, ébahi, aura passé une mauvaise nuit et que Romain a dormi sur ces deux oreilles, fort du sentiment du devoir accompli. Les défenseurs sont en forme, c’est donc au tour de Charles de s’illustrer un peu plus tard en transperçant nettement le milieu adverse, il poursuit son mouvement jusqu’à reprendre de volée un centre haut de Nico du plat du pied gauche à quelques mètres du but mais à bout portant, la frappe a des allures de passe et le gardien s’en saisit sans difficulté. Après 25 minutes en seconde période, les lions peinent de plus en plus à répondre au défi physique imposé par leurs adversaires mais ne flanchent pas. Avec ce qu’il leur reste de force, Marcel et Manu allument quelques belles mèches mais 3 positions de hors jeux successives de Thomas, déconcentré à ce moment de la partie, coupent court aux occasions de faire le break. Sur un contre bien remonté par Benoît et Bruno, Marcel part tout de même lancé plein axe et face à deux défenseurs décoche une frappe terrible à mi-distance à laquelle le gardien bien placé oppose ses deux poings. Les passes étant moins précises et les coups de reins moins vifs, le Racing en profite pour reprendre le jeu à son compte. Sur quelques longs ballons, les arrières léonins sont en difficulté mais Charles, Benoît et Yvan veillent au grain et restent efficaces. Sur leurs récupérations, ils hésitent à jouer en retrait vers un Daniel en quête de paix plus que de ballons, Romain tente le coup sous la pression d’un attaquant adverse mais n’imagine pas que les souffrances de Daniel l’empêchent d’enchaîner deux pas pour se saisir du ballon. L’ailier ne se fait pas prier et on se demande encore comment Daniel, moribond, empêcha l’attaquant de trouver le cadre. Trop handicapé pour poursuivre la partie, Daniel rend les armes à Yvan qui occupe désormais le poste de portier. Nico prend la place d’arrière gauche, ce qui réduit le potentiel offensif des lions et permet au Racing, à onze contre dix, d’accentuer sa domination. Sur une bonne phase de jeu du Racing, le numéro 13 slalome dans la défense côté droit et tire sur la base du poteau : grosse frayeur chez les lions. Le Racing pousse sans arrêt et finira par s’engouffrer dans une brèche quelques minutes plus tard sur une touche en apparence anodine, un milieu profite d’un manque de concentration des bleus marines pour récupérer le ballon dans l’entre jeu et centrer en profondeur par-dessus la défense, qui ne peut que freiner la course du ballon. Le 13, encore lui ne se fait pas prier, allume Yvan de près et envoie le ballon au fond des filets pour offrir à son équipe les 2 points du match nul.
Après match.
Après le match, les joueurs rendront hommage à leurs supporters qui n’avaient jamais été aussi nombreux. Dans les vestiaires, Marcel et Jo ne cachent pas leur émotion de quitter le club qui leur apporta tant sur les plans footballistique et financier. Ils mériteront que leurs noms allongent la liste des anciens, maigre compensation. Les conversations allaient bon train en troisième mi-temps. On ne se contentait pas de refaire le match mais on débattait des moments clé de l’histoire d’un club, fidèle à ses racines et qui regarde vers l’avenir sans s’appesantir sur son passé. Chacun repartait en pensant : « Vive les Lions de Ménilmontant ! »